La grogne monte : les employés de la STM — conducteurs, opérateurs, techniciens, maintenance — sont à nouveau en arrêt de travail. Et une fois de plus, ce sont les citoyens, les familles, les travailleurs qui dépendent du transport en commun qui paient le prix.
Des perturbations répétées, un service en otage
Lors de la grève qui a commencé fin septembre 2025, la direction propose une hausse de salaire de 12,5 % sur cinq ans. CityNews Montreal
Pendant ce temps, des milliers d’usagers se retrouvent sans solution fiable de transport. Le métro, les bus — piliers de la mobilité urbaine — sont fortement perturbés. Les arrêts, retards, service réduit, sont devenus monnaie courante.
Des salaires déjà élevés comparés à l’usager moyen
Il est manifeste que les conditions salariales à la STM sont bien au-dessus de la moyenne québécoise ou de ce que gagne l’usager typique. Par exemple :
- Le site Indeed indique un salaire moyen pour des employés de la STM aux alentours de 54 109 $ à 133 556 $ selon le poste. Indeed+1
- Un site Jooble signale des salaires allant jusqu’à près de 148 340 $ pour certains postes. Jooble
- Quant aux offres d’emploi, certains postes chez la STM affichent un taux horaire entre 27 $ et plus de 41 $ de l’heure. MTL Blog
En revanche, on observe que beaucoup d’usagers du système de transport collectif sont dans des tranches de revenus modestes ou moyens, subissant la hausse du coût de la vie, inflation comprise. Le contraste devient donc criant : d’un côté un salarié de la STM bien rémunéré, de l’autre un usager qui paie pour le service et dont le déplacement est rendu plus difficile par la grève.
Et maintenant : l’inflation comme toile de fond
L’inflation, cette hausse généralisée des prix, pèse fortement sur tous les budgets des ménages. Certains font valoir que les revendications salariales importantes peuvent contribuer à alimenter cette inflation : en augmentant les coûts salariaux dans un secteur, cela peut indirectement pousser à la hausse les prix des services ou le financement public, qui finit par retomber sur les contribuables ou usagers.
Ceci dit : les recherches montrent que, au Canada, « la croissance des salaires n’est pas la principale cause de l’inflation ». Par exemple, une analyse indique que les salaires ont crû de 3,9 % pour l’année terminée en mai, alors que l’inflation (indice des prix à la consommation) était beaucoup plus élevée, avec une perte de pouvoir d’achat pour les salariés. Centre for Future Work+1
Autrement dit : les revendications salariales visent surtout à rattraper une perte de pouvoir d’achat — mais elles sont vécues par beaucoup comme un privilège, surtout dans ce contexte de service perturbé.
Quand les usagers sont doublement pénalisés
- Perturbation du service : On paie l’abonnement ou le billet, on subit retards, annulations, incertitude.
- Hausse potentielle des coûts : Pour financer les hausses salariales, c’est souvent par une augmentation des taxes municipales, des subventions publiques ou une hausse des tarifs que l’on compense. Dans le cas de la STM, la direction mentionne qu’un accord à hauteur de 12,5 % sur cinq ans « excéderait le cadre financier » prévu. CityNews Montreal
Résultat : ceux qui utilisent le transport en commun — et paient aussi des impôts — se retrouvent à financer indirectement une grève qui les empêche de se déplacer.
Un système qui semble inversé
On pourrait formuler la chose ainsi : les usagers financent les salaires des employés qui les empêchent d’utiliser le service. Au-delà du simple conflit de travail, c’est une question de justice et de priorité : un service public essentiel ne devrait pas devenir un levier pour imposer des coûts additionnels aux usagers et aux contribuables.
Que faire ? Quelques pistes
- Transparence salariale : Les usagers doivent savoir combien gagnent les employés de la STM, dans quels postes, pour juger de la proportion entre service rendu et rémunération. Les données montrent déjà une fourchette élevée.
- Service garanti minimal : Dans un réseau de transport essentiel, prévoir un service garanti même en cas de grève. Le citoyen ne devrait pas être otage d’un conflit sectoriel.
- Lien entre rémunération et performance : Il serait raisonnable que les hausses salariales soient conditionnées à une amélioration du service (ponctualité, couverture, propreté…) plutôt qu’à un blocage du système.
- Dialogue citoyen et priorisation budgétaire : Si l’accord dépasse les capacités financières de la STM, comment cela va-t-il se traduire ? Par des coupes, des hausses de tarifs, des impôts ? Le citoyen doit en connaître les conséquences.
Conclusion
Le transport en commun est l’un des piliers d’une ville moderne et équitable. Lorsqu’un grand nombre d’usagers dépendent de la STM pour aller travailler, étudier, vivre, la grève ne doit pas devenir le moyen par lequel une partie impose à l’autre des coûts supplémentaires.
Non seulement les salariés de la STM font partie des mieux rémunérés dans ce contexte particulier, mais en plus, ils exigent des hausses alors que le système est déjà perturbé, et que les usagers subissent. Ajouter à cela un contexte d’inflation où chaque dollar compte pour les familles, et l’équation devient socialement explosive.
Si la grève se poursuit, les usagers demandent plus qu’un retour au travail : ils demandent un service fiable, une justice dans les rémunérations, et que ce ne soit pas eux qui paient la facture.
